Mmmm… Vaste question à laquelle je suis souvent confrontée et à laquelle j’ai beaucoup de mal à répondre de manière succincte. 

Pour commencer, voici la réponse « technique » : c’est du Raja Yoga, c’est à dire un yoga basé sur les Yoga-Sutra de Patañjali, un traité philosophique vieux de plus de 5000 ans, basé sur la pratique de 8 membres (comprendre comme un arbre à 8 branches). En ceci il diffère du Hatha Yoga, qui lui est basé un texte du XVème siècle, le Hatha Yoga Pradipika. 
Si je souhaite préciser, je peux dire que c’est du Viniyoga, le yoga de l’adaptation, tel que Sri Krishnamacharya (le maitre qui a (re)mis en lumière le yoga au 20ème siècle) l’a enseigné à son fils T.K.V. Desikachar. 
Si je veux être totalement « honnête », je dois dire que je n’ai pas le droit d’utiliser le terme viniyoga qui a été déposé par le fils de Desikachar, et que ne sont autorisés à utiliser cette marque déposée les seuls enseignants passés par son école.

On pourrait disserter des heures sur les types de familles, origines, croisements et recoupements des origines des yoga. Mais ce que j’enseigne c’est du Yoga. Point.
Parce que la respiration est au cœur de nos mouvements, parce que c’est elle qui déclenche les mouvements et non l’inverse. Cette respiration s’appelle en sanskrit « prana ». En réalité, ce terme regroupe deux orthographes : prana avec un « p » minuscule, la respiration au sens de inspiration/expiration ; et Prana avec un « P » majuscule, la respiration au sens de souffle vital, énergie de vie. Mais je m’éloigne… 

« Quel type de yoga enseignes-tu ? »

J’aimerai dire : « Je pratique et j’enseigne le yoga de Krishnamacharya, tel qu’il l’a enseigné à son fils TKV Desikachar, tel qu’il l’a enseigné à Michel Alibert, tel qu’il l’a enseigné et l’enseigne à Sandra Ermeneux, qui me l’enseigne ». Cette lignée, cette descendance, est appellée dans l’hindouisme le Parampara, la transmission. 

Ce n’est pas tant le concept de descendance qui m’intéresse ici, mais plus la volonté de mettre en avant l’origine de mes connaissances ; car au risque de vous décevoir – ou de vous rassurer je ne sais pas !, je n’ai rien inventé du tout. Je m’efforce chaque jour d’intégrer l’enseignement que je reçois, qui est extrêmement riche de vécu, je parle ici des mes enseignants (Michel Alibert, 80 ans passés, Sandra Ermeneux, 40 ans d’étude approfondie). 
Et c’est là le point crucial : la différence entre enseignement et transmission. Je sais, le sujet semble bateau. Il est pourtant central pour tout enseignant et tout élève. 

On peut enseigner les postures relativement facilement : les manuels et tutos sont pleins d’informations sur le bon muscle à mobiliser, le bon degré à installer entre le genou et la hanche, etc. Mais transmettre le yoga, c’est super dur ! Enfin, je trouve. Comment créer les conditions physiques chez ses élèves pour qu’ils puissent percevoir, toucher du doigt, puis appréhender, ce fameux Prana souffle de vie ? Comment partager sa fascination pour la vie telle que parfaitement expliquée par le Yoga sans passer pour une illuminée, et sans laisser ses élèves sur le bord de la route ? Car nous le savons tous, l’enfer est pavé de bonnes intentions. 

L’enthousiasme peut-être dévorant. Je suis sûre que vous avez déjà eu cette expérience de vouloir offrir quelque chose à quelqu’un qui n’en voulait pas. Il y a un peu de cela lorsqu’on « veut » absolument faire passer quelque chose à ses élèves, plutôt que d’être dans une proposition que les élèves explorent avec leurs propres grilles de lecture. Il y a un difficile équilibre à trouver entre avoir un projet pour ses élèves, et ne pas leur donner le résultat tout de suite – si tant est qu’on le puisse (tout au plus pourrons-nous parler de ce résultat, ça ne restera que théorique). 

Le reste, la pratique, se vit individuellement. Je dirais même intimement. Mais donner quand même le goût, l’intuition, la curiosité de ce qu’il y a derrière la posture. Nous ne pouvons et ne devons, pour des questions éthiques, qu’amener l’élève à percevoir et discerner ce qui se passe en lui. 

Alors, peut-être que ça deviendra moins important pour l’élève de savoir « quel yoga » il pratique…

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